Dans le monde de la photographie professionnelle, il y a une étape invisible pour la plupart des clients : le développement du fichier RAW.
Beaucoup se demandent : « Pourquoi le photographe ne me donne pas les images directement après la prise de vue ? »
En réalité, la réponse tient à la fois à des raisons techniques, artistiques et pratiques.
Le fichier RAW : la matière première du développement de la photo numérique
• Pour commencer qu’est-ce que c’est ?
Le fichier RAW est un fichier brut, directement issu du capteur de l’appareil photo. Ce n’est pas une photo. Même si l’on a l’impression de pouvoir la visualiser comme telle.
Par exemple, dans le cas de Canon, les formats .CR2 et .CR3 contiennent toutes les données captées par le capteur, sans compression destructive, avec une profondeur de couleur souvent de 12 ou 14 bits par canal.
• Pourquoi c’est précieux ?
Ainsi, comme un négatif argentique, il permet de retravailler l’image en profondeur.
Corriger l’exposition, récupérer des détails dans les ombres ou les hautes lumières, ajuster la balance des blancs avec précision.
• Le rôle du photographe :
De plus travailler avec des fichiers RAW permet d’ajuster le rendu final de la photo avec une grande précision, comme l’étape en argentique où l’on révèle un négatif sur papier photo.
C’est aussi l’occasion d’insuffler sa signature visuelle, cette empreinte unique qui donne à chaque image son âme et son harmonie.

Profondeur de codage des couleurs : Fichier RAW vs écran
Pour bien comprendre l’intérêt du RAW, il faut parler de la profondeur de codage en bits, qui détermine le nombre de nuances possibles dans chaque canal de couleur (Rouge, Vert, Bleu).
C’est un élément clé qui explique pourquoi le photographe travaille en fichier RAW.
Concrètement, pour les RAW Canon CR2 / CR3, le codage permet :
- 12 bits → 4 096 niveaux par canal → ≈ 68 milliards de couleurs
- 14 bits → 16 384 niveaux par canal → ≈ 4 398 milliards de couleurs
Grâce à cela, on obtient des dégradés ultra-fins et la possibilité de retouches poussées sans apparition de banding (cassures dans les dégradés).
En comparaison, un écran standard (grand public) affiche généralement 8 bits par canal (≈ 16,7 millions de couleurs). Même si le RAW contient des milliards de nuances, un écran standard ne peut en afficher qu’une partie.
En revanche, les écrans HDR (haut de gamme), ils affichent généralement 10 bits par canal (≈ 1,07 milliard de couleurs). Cela signifie plus de couleurs et une plage dynamique élargie, ce qui permet de mieux profiter des nuances d’une photo, à condition qu’elle soit exportée dans un format compatible HDR comme HEIF/HEIC 10 bits, AVIF HDR ou TIFF 16 bits.
Cependant, ces fichiers ne sont pas lisibles sur tous les appareils : pour en profiter pleinement, il faut un écran compatible HDR et un logiciel ou système capable de gérer ce type de format.
Enfin, le fichier JPEG, lui, est codé en 8 bits par canal → 256 niveaux par canal → ≈ 16,7 millions de couleurs.
C’est actuellement suffisant pour l’affichage final et l’impression (également codée en 8 bits), mais ce type de fichier reste est moins flexible pour les retouches des photos.
Ce que le fichier RAW permet en plus d’une gestion étendue des couleurs
Au-delà de la richesse colorimétrique, le RAW offre d’autres avantages essentiels :
- Plus grande latitude d’exposition : récupération des détails dans les ombres et les hautes lumières, même en cas de légère sous- ou surexposition.
- Balance des blancs ajustable après coup : correction précise des dominantes de couleur sans perte de qualité.
- Contrôle total du rendu : aucun traitement destructif appliqué par l’appareil, tout est décidé en post-production.
- Meilleure gestion du bruit numérique : réduction plus efficace, surtout en hautes sensibilités ISO.
En résumé, ces atouts donnent au photographe une flexibilité maximale pour sublimer chaque image lors de son développement avant de la livrer.
En pratique, la majorité des écrans utilisés par les clients (ordinateurs portables, smartphones, tablettes) sont limités à l’affichage 8 bits par canal.
Cela signifie qu’un JPEG bien optimisé par le photographe contient déjà toute la richesse colorimétrique que votre écran peut afficher.
Ainsi, le RAW, lui, sert surtout en coulisses pour permettre au photographe de tirer le meilleur de chaque image, tant en couleurs qu’en lumière et en détails, avant de l’exporter dans un format universel et parfaitement adapté à votre usage.
Le fichier JPEG reste le standard pour bien des raisons :
- Compatibilité universelle : le JPEG s’ouvre sur tous les appareils
- Poids réduit : facile à partager et à stocker
- Image finalisée : fidèle à la vision du photographe
- Le RAW est une matière première, pas une œuvre fini
Conclusion
Le photographe travaille en RAW pour capturer la totalité des informations et des couleurs possibles, avec une profondeur de codage bien supérieure à celle du JPEG.
C’est dans ce format qu’il peut ajuster chaque détail, harmoniser les teintes et insuffler sa signature visuelle, cette empreinte unique qui donne à chaque image son âme et son harmonie.
Une fois ce travail accompli, il livre des fichiers JPEG optimisés pour votre usage, calibrés pour s’afficher parfaitement sur la majorité des écrans et supports.
Toutefois, sur demande, il peut également proposer une option pour fournir des photos compatibles HDR 10 bits, au format HEIF/HEIC, AVIF HDR, TIFF 16 bits.
⚠️ Attention : ces fichiers ne sont pas lisibles sur tous les appareils. Un écran HDR et un logiciel compatible sont nécessaires pour en apprécier toute la richesse.
En définitive, demander un fichier RAW, c’est un peu comme demander à un chef étoilé de vous servir les ingrédients crus au lieu du plat cuisiné : tous les ingrédients sont là, mais il manque l’assemblage, l’assaisonnement et le savoir-faire qui transforment la matière brute en une œuvre aboutie : une véritable palette de saveurs.